12 juil. 2013

Dans quelques mois, les élections municipales...

Le poste de maire dans un gros village d'un bon millier d'habitants n'est pas aussi gratifiant que ce qu'on pourrait penser. Passé l'euphorie du succès à l'élection et des premiers jours de découverte, on s'aperçoit que rien n'est vraiment facile.

Concernant les affaires courantes, déjà, contrairement aux grandes villes, il n'y a pas de service technique, seulement une poignée de personnes préposées aux écoles (garderie, cantine, ATSEM), et deux ou trois ouvriers plus ou moins polyvalents. Il incombe donc au maire et aux adjoints de manager ce personnel et de se transformer en DRH et en chef d'entreprise. Ce n'est pas toujours évident, sans oublier que les fonctionnaires territoriaux sont innamovibles et ne l'oublient jamais...

Toujours en l'absence de service technique, ce sont le maire et les conseillers municipaux qui se chargent de l'organisation des manifestations (achat de victuailles, de gerbes, préparation des tables, service, vaisselle..), des distributions des diverses communications dans les boîtes aux lettres des habitants, de la maintenance du site internet, de la rédaction et de la mise en page du journal communal, et autres tâches ancillaires fort chronophages et pas toujours passionnantes. Quant aux autres manifestations, kermesse, foire à tout, et autres expositions, si elles sont en grande partie du ressort des associations, il ne faut pas oublier que leurs membres sont aussi, en vertu d'une loi bien connue dans tout bénévolat, membres pour majorité du Conseil. Donc, ce sont les mêmes qui changent seulement de casquette.

Si l'équipe municipale a des projets, agrandissement de l'école, amélioration de la voirie, nouveaux équipements collectifs, il faut avoir la foi chevillée au corps, une grande patience, et une bonne dose d'acharnement. Comme évidemment, il faut demander des subventions aux instances supérieures, département, région, état, il faut du temps, ne pas se décourager ni au premier, ni au second refus, re-présenter à nouveau le dossier jusqu'à ce que l'indispensable manne tombe enfin, plusieurs années après le lancement de l'idée. Ensuite, il faudra suivre le chantier tous les jours, vérifier les détails, ce qui demande compétences et temps, deux denrées rares.

Encadré par les instances supérieures, dépendant d'elles pour l'argent, mais aussi pour les autorisations administratives diverses, le maire (et son conseil) n'ont pas les coudées franches. Un technocrate peut ainsi parfaitement accorder un permis de construire, du moment que la nouvelle construction répond aux critères énergétiques en vigueur ; c'est ainsi que l'on peut voir fleurir d'horribles blockaus, dénaturant totalement l'harmonie d'un vieux village avec toiture d'une seule pente, et ouvertures étranges, mais réjouissant les écologistes locaux (*). Les mises en sécurité routières, dans la traversée de la commune sont elles-aussi tributaires du quitus des DDE (**) qui préconisent (la plupart du temps ce qui est le plus onéreux), conseillent (avec beaucoup de persuasion) et n'acceptent in fine que ce qu'elles ont décidé. Libre ensuite de "faire" ou pas....

Donc, à part célébrer les mariages, que reste-t-il au maire ? Une prérogative que nul ne lui dispute, celle d'être la victime de tous les râleurs, et en France on n'en manque pas, qui ne sont jamais contents et qui viennent sans arrêt se plaindre que le voisin fait ci et que la mairie ne dit rien, que les voitures roulent trop vite et qu'il faudrait un ralentisseur, mais surtout pas devant chez eux, parce que ça fait trop de bruit, que les 3 euros demandés pour un repas à la cantine sont hors de prix, qu'il n'y a pas assez de transports en commun, que tel panneau est mal placé, que..... C'est étrange tout de même, mais on ne voit jamais quelqu'un venir dire merci.....

C'est aussi lui (ou un adjoint à la rigueur) qui doit se déranger pour séparer deux ivrognes sur la voie publique, ou prévenir le fermier que ses vaches se promènent sur la départementale et qu'il veuille bien rétablir l'ordre et la sécurité immédiatement !

Alors, si on a vraiment la fibre municipale, faut choisir (autant que faire se peut) une toute petite commune, 2 à 300 habitants, ou une grande. Dans le premier cas, on a forcément des ambitions modestes, donc la gestion est facilitée. Ça n'empêchera pas les vaches de baguenauder ni les querelles de voisinage, mais, tout du moins pour ces dernières, elles seront plus limitées. Dans le second cas, il y a toute une infrastructure technique à disposition qui débarasse des tâches matérielles allant de la distribution aux administrés des communications communales à la surveillance des chantiers en passant par le management des employés, ce qui permet aux élus de se concentrer sur ce qui est primordial dans leur tâche sans être noyés sous un flot de détails matériels à résoudre.

C'est pourquoi le travail avec des instances supérieures, comme par exemple avec les communautés d'agglomération, est bien plus gratifiant et par là plus productif. Certes, plus on s'y élève et plus les responsabilités sont importantes, et il ne s'agit plus alors de bénévolat.

Toutefois, et il ne faut pas le nier, en un seul mandat, on apprend beaucoup de choses, on rencontre des gens intéressants (mais oui, il n'y a pas que des emmerdeurs), on fait une expérience enrichissante (intellectuellement bien sûr, pas matériellement), ce qui explique sans doute que d'ici quelques mois, plus d'un million de français vont se présenter devant les électeurs pour l'accès à un mandat local. Certains s'y donneront totalement, d'autres feront de la figuration, certains seront amers de ne pas avoir pu faire ce qu'ils auraient souhaité, d'autres seront satisfaits de leur travail, certains voudront rempiler pour 6 autres années, d'autres s'arrêteront ou seront poussés dehors, mais tous auront quand même vécu une expérience qui fera date dans leur vie.

(*) Je n'ai jamais compris pourquoi une construction "basse consommation" devait être aussi laide ! Pourquoi les architectes sont-ils incapables de concevoir un bâtiment dans le style local tout en respectant les normes écologiques ? C'est vrai que quand on voit des éoliennes défigurant les falaises de Fécamp, on se dit que l'écologie et le respect des paysages ne vont pas bien ensemble...

(**) Oui, je sais, on ne dit plus comme ça, on dit DDTM : Direction Départementale des Territoires et de la Mer, même si la façade maritime de l'Eure est plutôt réduite à .... une façade d'estuaire ! Voir Berville-sur-Mer

1 commentaire:

Smeablog a dit…

Il manque peut être un personnage au tableau : la (ou le d'ailleurs) secrétaire de mairie ...