Apprendre à jouer d'un instrument n'est pas forcément chose facile. Mais certains sont plus évidents que d'autres. Quand il y a un clavier, piano, orgue, synthétiseur, on peut d'emblée sortir un son, il suffit de poser le doigt sur une touche. Un chat qui se promène sur un clavier de piano peut tout à fait obtenir involontairement un air qui n'est pas très différent de certaines compositions modernes d'ailleurs ! Certes, avant d'avoir aisance, voire virtuosité, il va s'écouler un certain temps fait d'exercices, de gammes, d'essais, mais à force de travail et de persévérance, on finira quelque peu par s'améliorer.
Les instruments à corde, c'est déjà différent. Un nouvel adepte du violon réussit souvent à faire fuir tous les chats du voisinage et à écorcher durablement les oreilles de son entourage, mais au moins il arrive à sortir quelque bruit entre ses cordes et son archet. Mais avec les instruments à vent, là, ça se complique. Parce qu'on a beau souffler désespérément dans le tuyau, rien ne vient, on s'époumone en vain, et on finit par regarder d'un oeil torve cette chose muette qui, dans les mains de vrais musiciens, donne des sons si harmonieux. Pourquoi ça ne marche pas ?
Ayant entrepris d'apprendre à jouer de la cabrette, qui est, pour ceux qui n'ont jamais mis les pieds en Auvergne, une sorte de cornemuse locale, apparentée au biniou breton, je me suis retrouvée avec une poche qui doit se remplir d'air sous un bras, un soufflet préposé à remplir la dite poche sous l'autre, et au milieu, une sorte de flûte à bec percée de trous sur laquelle les doigts doivent, par leur combinaison, former des notes.. Même si c'est fort éloigné des différents claviers que j'ai l'habitude d'utiliser, les positions des doigts ressemblent fort à celle que je pratiquais sur la flûte à bec, donc.... Eh bien non ! Pas du tout ! Déjà, faut remplir la poche d'air ni trop, ni trop peu, exercer avec le coude gauche une pression constante, ni trop, ni trop peu, utiliser le soufflet avec le coude droit mais... ni trop ni trop peu, coordonner cette machinerie souffleuse afin de faire passer de l'air dans le tuyau, lequel donnera une note.
Première tentative : pas le moindre son, sinon, celui d'un filet d'air qui s'épuise vite. Ensuite, une sorte de couinement qui ressemble plus au cri du cochon qu'on égorge qu'à une note harmonieuse de musique. Enfin, deux notes successives sortent, en soulevant un doigt mais... pas plus, plus d'air, plus de carburant, par contre, quelques crampes dans les épaules !!
Faut pas se décourager ; je regarde sur des documentations comment les joueurs de cabrette tiennent leur instrument, et rectifie ma position. Déjà ça va un peu mieux, j'arrive à sortir trois voire cinq notes successives, mais je reste encore perplexe sur le maniement du soufflet et du sac réunis. Ce qui me console, c'est que je ne suis pas la seule. Voilà comment un joueur fort connu (oui, localement, mais faut dire que son instrument est moins répandu que d'autres), a raconté ses débuts :
" Je me suis arrêté en chemin pour faire mon premier essai. Je n'ai rien pu en tirer hormis quelques sons de coq enroué. Je n'arrivais pas à tenir la bête : car c'est bien d'un animal dont il s'agissait, tant du point de vue de la forme que du son. Cette excroissance de mon corps ne parvenait pas à s'associer à la représentation que j'avais de moi-même et je ne voyais pas comment faire pour tout à la fois remplir le sac en manipulant le soufflet, appuyer sur la poche pour envoyer de lair dans les tuyaux et faire bouger mes doigts pour fabriquer l'équivalent de la musique que je faisais avec ma flûte... D'essai en essai, de plus tard en plus tard, ce furent des mois de confrontation avec un fauve qui ne voulait pas se laisser faire. Le dressage fut long et pénible, décourageant et difficile pour, un beau jour, sans savoir pourquoi, découvrir la sensation de maîtriser cette soufflerie infernale. Les doits pouvaient alors reprendre la suite de la flûte et découvrir les possibilités qu'offrait la cabrette..."
Alors rien n'est perdu ? Mais non, faut pas imaginer être arrivé avant d'être parti, et tout nécessite apprentissage, donc, on y retourne... En se disant que c'est quand même bien (pour eux) de ne pas avoir de voisins, et que peut-être l'année prochaine, à pareille époque, à défaut de jouer une bourrée endiablée, je pourrais peut-être arriver au bout d'Au clair de la lune !!
1 commentaire:
Passer les tracasseries de l'apprentissage, voilà un instrument pratique pour l'asthmatique qui veut jouer de la flûte
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