Dans un bouquin déjà ancien (1994), Gilles de Gennes, prix Nobel de physique, cite une phrase d'Alfred Kastler, autre prix Nobel, qui dit : "Dans notre enseignement, l'initiation aux sciences est entièrement dominée par des mathématiques tournées de plus en plus vers l'abstraction. On développe chez l'enfant unilatéralement le sens de la déduction logique [...] On juge des aptitudes d'un élève à s'orienter vers les sciences uniquement par son goût pour la mathématique et la logique". En lisant ça, je me suis téléportée sur les bancs du lycée, en classe de quatrième, en 1959, quand notre professeur de mathématiques tentait de nous enseigner des rudiments de trigonométrie. On parlait de sinus, de cosinus, de tangente, de calculs qui me semblaient totalement abscons, de choses qui me paraissaient totalement irréelles et je ne comprenais rien à tout ça. J'ai osé alors poser une question au prof : "Mais madame, à quoi ça sert tout ça ?". Et me suis récupéré un cinglant "Taisez-vous mademoiselle !" qui m'a laissée de nombreuses années sur ma faim, puisqu'il m'a fallu attendre de faire mes débuts en programmation, bien longtemps après (presque 30 ans plus tard), pour, ayant besoin de dessiner un cercle, comprendre enfin à quoi servaient ces étranges sinus, cosinus et tangente !
Certes, je comprends très bien que le prof n'ait pas donné comme exemple que pour programmer le dessin d'un cercle il fallait utiliser la trigonométrie, elle ne pouvait évidemment pas le savoir, mais donner un exemple d'architecture, de dessin de plans, ou toute autre chose concrète qui m'aurait permis de ne pas avoir l'impression que tout ça était parfaitement inutile et juste bon à torturer les pauvres élèves... Qui sait, ça m'aurait peut-être donné l'envie d'en savoir plus et je n'aurais pas traîné ensuite cette nullité crasse en mathématiques qui m'a empêchée de faire les études que je souhaitais, et m'a fermé les portes de connaissances qui me manquent maintenant alors que j'ai toujours la curiosité de les découvrir.
Pourquoi, par exemple, à l'époque, basait-on le départ des études médicales uniquement sur les compétences mathématiques ? Pas la biologie, ni l'anatomie comparée, non, les maths, comme nous l'avait bien précisé un professeur de Jussieu : "Si vous sortez de math sup, vous n'aurez aucun problème cette année ; si vous avec fait math élem comme bac, en travaillant beaucoup, vous y arriverez peut-être ; si vous sortez d'un bac philo ou sciences expérimentales, inutile de continuer, vous n'y arriverez jamais." (*) On se demande en quoi les maths sont indispensables à un médecin généraliste ou à un urologue à l'hôpital, ou peut-être était-ce fait pour formater l'intelligence à l'acquisition d'autres connaissances, mais alors sans doute aurait-il fallu enseigner autrement. Je n'ose penser qu'il s'agissait uniquement d'une forme de sélection laquelle n'aurait pas été fort judicieuse pour exercer la médecine, qui demande bien d'autres qualités.
Ayant quitté l'enseignement secondaire il y a plus d'un demi siècle, j'espère que les choses ont évolué dans le bon sens mais, je ne sais pas pourquoi, j'ai quelques doutes... !!!
Je dédie tout spécialement ce billet de blog à mon ami Rome2 qui passe par là de temps en temps ; lui qui n'a pas quitté le lycée depuis bien longtemps, sans doute pourrait-il dire si l'enseignement des mathématiques s'est amélioré ou pas, et si l'observation de monsieur Kastler est toujours d'actualité.
(*) j'emploie les intitulés des bacs de cette époque, et je ne sais pas à quoi correspond maths sup actuellement...
Certes, je comprends très bien que le prof n'ait pas donné comme exemple que pour programmer le dessin d'un cercle il fallait utiliser la trigonométrie, elle ne pouvait évidemment pas le savoir, mais donner un exemple d'architecture, de dessin de plans, ou toute autre chose concrète qui m'aurait permis de ne pas avoir l'impression que tout ça était parfaitement inutile et juste bon à torturer les pauvres élèves... Qui sait, ça m'aurait peut-être donné l'envie d'en savoir plus et je n'aurais pas traîné ensuite cette nullité crasse en mathématiques qui m'a empêchée de faire les études que je souhaitais, et m'a fermé les portes de connaissances qui me manquent maintenant alors que j'ai toujours la curiosité de les découvrir.
Pourquoi, par exemple, à l'époque, basait-on le départ des études médicales uniquement sur les compétences mathématiques ? Pas la biologie, ni l'anatomie comparée, non, les maths, comme nous l'avait bien précisé un professeur de Jussieu : "Si vous sortez de math sup, vous n'aurez aucun problème cette année ; si vous avec fait math élem comme bac, en travaillant beaucoup, vous y arriverez peut-être ; si vous sortez d'un bac philo ou sciences expérimentales, inutile de continuer, vous n'y arriverez jamais." (*) On se demande en quoi les maths sont indispensables à un médecin généraliste ou à un urologue à l'hôpital, ou peut-être était-ce fait pour formater l'intelligence à l'acquisition d'autres connaissances, mais alors sans doute aurait-il fallu enseigner autrement. Je n'ose penser qu'il s'agissait uniquement d'une forme de sélection laquelle n'aurait pas été fort judicieuse pour exercer la médecine, qui demande bien d'autres qualités.
Ayant quitté l'enseignement secondaire il y a plus d'un demi siècle, j'espère que les choses ont évolué dans le bon sens mais, je ne sais pas pourquoi, j'ai quelques doutes... !!!
Je dédie tout spécialement ce billet de blog à mon ami Rome2 qui passe par là de temps en temps ; lui qui n'a pas quitté le lycée depuis bien longtemps, sans doute pourrait-il dire si l'enseignement des mathématiques s'est amélioré ou pas, et si l'observation de monsieur Kastler est toujours d'actualité.
(*) j'emploie les intitulés des bacs de cette époque, et je ne sais pas à quoi correspond maths sup actuellement...
6 commentaires:
Hello,
Tout d'abord, la réponse faites par ta prof, me rappelle qu'a cette époque, on fessait peu de cas des questions des élevés, et mêmes des enfants en général.
Ensuite, concernant, "cette nullité crasse en mathématiques" comme tu dit, c'est un truc que l'on "hérité" de la façon dont on à vécu l'école. Moi, c'est plutôt l'orthographe et ses règles compliquées qui m'ont vraiment dégouté (Oui, oui, cela se voit un peu !)
Heureusement, de nos jours, les profs ont changé leur fusil d'épaule et répondent plus volontiers aux questions des élevés, et les parents aussi, vu que notre niveau d'étude a tendance a s'élever. Je voit mal mes parents m'expliquer a quoi peut bien servir une intégrale !
Heu, par contre pour les bac, il ne me semble pas qu'il y ai eu un bac nommé "math sup" si j'en crois notre site préféré ! https://fr.wikipedia.org/wiki/Baccalaur%C3%A9at_en_France#Baccalaur.C3.A9at_de_l.27enseignement_du_second_degr.C3.A9
Par contre, oui il y avait bien un bac "Math élémentaire" ainsi que Philo et sciences expérimentale ! Je pense qu'il devait plutôt parlé de ceux qui sortait de classe prépa.
Aratal
J'ai bien parlé du bac maths élem et de ce qu'on appelait maths sup qui était peut-être une classe prépa, mais tout ça a bien changé.. Quant aux parents, ma mère, prof de lettres, ne risquait pas de me parler des intégrales !!! Par contre, elle m'a donné le goût de la lecture et de l'orthographe... Comme quoi il faut de tout pour faire un monde !
Yep, Maths Sup, c’est la première année de prépa scientifique (les taupins, en opposition aux khâgneux des prépas littéraires).
À propos des maths dans la médecine, voir http://www.uclouvain.be/cps/ucl/doc/fsa/documents/Math_et_medecine_Dedramathisons_2013.pdf ;)
Merci Theoliane pour cet hommage, comme tout le monde le sait les maths et moi, ça fait 3 car j'ai toujours eu une passion débordante pour cette science des plus agréable et amusante.
Très bon billet en tout cas et ça me rappelle mon prof de lycée qui m'envoyait au tableau afin de résoudre l'exercice en me disputant parce que je comprenais rien, c'est pas grave, on perdait 15 min le temps qu'on me souffle la réponse (que de bons souvenirs :D)
Je confirme la phrase "Taisez-vous mademoiselle !", car il voulait pas me répondre quand je lui posait une question, car ma question était "trop conne" (sauf que moi c'était monsieur :p)
Venons en à la question : Est-ce que l'enseignement des Mathématiques c'est amélioré ?
La réponse est non, car la remarque des profs de maths "Vous n'aurez jamais le bac" existe toujours (mais maintenant, ils le font devant les élèves :p)
Je préférai faire mon cercle sans utiliser la trigonométrie, que je n'ai toujours pas compris d'ailleurs.
Sinon, c'est encore le cas pour les études de vétérinaire, on considère qu'on peut intégrer l'école de vétérinaire grâce à la biologie et surtout les mathématiques alors que la vétérinaire de mes animaux dit que cela sert à rien pour la médecine.
Si quelqu'un veut me donner des cours en maths, n'hésitais pas, mais soyez patient, car c'est dur à la détente.
Je me retrouve tellement dans ce post... J'aurai bien fait S au lycée et ensuite un truc scientifique, c'est ce qui me tentais le plus, mais mon niveau en math ne me l'a pas permis.
Ayant fait des mathématiques mon métier, je dois bien admettre avoir eu les mêmes pensées. Mais à quoi bon la factorisation, le théorème de Pythagore, les produits scalaires ? Et il m'aura fallu attendre l'année de terminale pour avoir la révélation, quand les professeurs de mathématiques et physique sont parvenus à synchroniser leurs cours de sorte que les résultats de l'un trouvaient des applications pratiques dans l'autre. Dès lors, tout fut clair pour moi. Je comprends que d'autres n'aient eu ni la patience ni la persévérance de voir vers quoi ça menait, mais je peux vous assurer que tout ça a un sens ^^
Pour rebondir sur l'exemple de schlum, un autre cas de maths en médecine : j'ai vu mon beau-père, chirurgien orthopédique, utiliser la trigonométrie pour réparer une scoliose. True story.
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